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Arrêt de la Cour (4ème
chambre) du 18 janvier 1996.
Procédure pénale
contre Finn Ohrt.
Demande de décision préjudicielle: Kriminal- og Skifteretten i
Frederikshavn - Danemark.
Notion de navire
participant à une inspection de pêche - Obligations du
capitaine du navire à inspecter.
Affaire C-276/94.
Recueil de
jurisprudence 1996 page I-00119
Contenu de l'arrêt
1 Pêche - Conservation des ressources de la
mer - Régime de quotas de pêche - Mesures de contrôle -
Inspection de navires de pêche - Modalités d'application -
Obligation pour les navires participant à une inspection
d'arborer une flamme d'identification de manière visible - Portée
- Bateau accessoire opérant provisoirement d'une manière indépendante
- Inclusion
(Règlement de la Commission n_ 1382/87, art. 2 et annexe I)
2 Pêche - Conservation des ressources de la mer - Régime de
quotas de pêche - Mesures de contrôle - Inspection de navires
de pêche - Modalités d'application - Obligation du capitaine
d'un navire à inspecter de se conformer aux ordres d'un représentant
de l'autorité compétente d'un État membre - Condition -
Connaissance de la qualité de ce représentant - Présomption
d'ignorance
(Règlement de la Commission n_ 1382/87, art. 2 et 3)
Sommaire
3 L'article 2 du règlement n_ 1382/87, établissant des
modalités d'application en ce qui concerne l'inspection de
navires de pêche, doit être interprété en ce sens que tout
navire d'inspection doit arborer, quels que soient son type ou
ses dimensions, le signe ou la flamme d'identification décrit à
l'annexe I dudit règlement.
En effet, seul ce signe distinctif, arboré de manière visible,
permet au capitaine d'un bateau de pêche d'identifier le navire
d'inspection et d'obtempérer à ses ordres, sans autre forme
d'avertissement, ainsi que le prévoit l'article 3, paragraphe 1,
de ce même règlement. Cette constatation ne saurait être
infirmée par le fait que le bateau qui procède à l'inspection
est accessoire au navire d'inspection principal, mais opère
provisoirement d'une manière indépendante.
4 L'obligation de se conformer aux ordres d'un représentant de
l'autorité compétente d'un État membre, en vertu de l'article
3 du règlement n_ 1382/87, établissant des modalités
d'application en ce qui concerne l'inspection de navires de pêche,
présuppose la connaissance de la qualité de ce représentant
par le capitaine d'un navire faisant l'objet d'une inspection. En
l'absence du signe ou de la flamme d'identification, prescrit par
l'article 2 dudit règlement, le capitaine est présumé ignorer
cette qualité, à moins que les autorités poursuivant
l'infraction n'établissent qu'il en avait connaissance.
Parties
Dans l'affaire C-276/94,
ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application
de l'article 177 du traité CE, par le Kriminal- og Skifteretten
i Frederikshavn (Danemark) et tendant à obtenir, dans la procédure
pénale poursuivie devant cette juridiction contre
Finn Ohrt,
une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation des
articles 2 et 3 du règlement (CEE) n_ 1382/87 de la Commission,
du 20 mai 1987, établissant des modalités d'application en ce
qui concerne l'inspection de navires de pêche (JO L 132, p. 11),
LA COUR
(quatrième chambre),
composée de MM. C. N. Kakouris, président de chambre, P. J. G.
Kapteyn et H. Ragnemalm (rapporteur), juges,
avocat général : M. A. La Pergola,
greffier : M. R. Grass,
considérant les observations écrites présentées:
- pour le gouvernement danois, par M. Peter Biering, conseiller
juridique au ministère des Affaires étrangères, en qualité
d'agent,
- pour la Commission des Communautés européennes, par M. Hans
Peter Hartvig, conseiller juridique, en qualité d'agent,
vu le rapport du juge rapporteur,
ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience
du 12 octobre 1995,
rend le présent
Arrêt
Motifs de l'arrêt
1 Par ordonnance du 6 octobre 1994, parvenue à la Cour le 11
octobre suivant, le Kriminal- og Skifteretten i Frederikshavn a
posé, en vertu de l'article 177 du traité CE, deux questions préjudicielles
sur l'interprétation des articles 2 et 3 du règlement (CEE) n_
1382/87 de la Commission, du 20 mai 1987, établissant des
modalités d'application en ce qui concerne l'inspection de
navires de pêche (JO L 132, p. 11, ci-après le «règlement»).
2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'une procédure
pénale engagée contre M. Ohrt, prévenu d'avoir enfreint les
dispositions nationales mettant en oeuvre l'article 3, paragraphe
1, du règlement. Cet article dispose que «Le capitaine d'un
navire devant faire l'objet d'une inspection peut être contraint
par un représentant de l'autorité compétente d'un État membre
de s'arrêter, de procéder à des manoeuvres ou à d'autres opérations
pour faciliter la montée à bord.»
3 M. Ohrt, capitaine du navire de pêche «Actinia», naviguait
dans les eaux du Kattegat nord lorsqu'il a été approché par le
canot pneumatique d'accostage du navire d'inspection danois «Nordjylland»
qui procédait à une inspection de pêche. M. Ohrt a poursuivi
sa route sans prêter attention aux avertissements transmis tant
par radio que par signaux lumineux lui enjoignant de s'arrêter
immédiatement.
4 Il ressort de l'ordonnance de renvoi que le canot pneumatique
était dépourvu du signe d'identification requis par l'article 2
du règlement, aux termes duquel «Tout navire participant à une
inspection arborera, de manière visible, une flamme ou un signe
comme indiqué à l'annexe I.» Cette flamme d'inspection était
uniquement arborée par le navire principal, le «Nordjylland»,
qui ne se trouvait pas à proximité de l'«Actinia».
5 Devant la juridiction nationale, M. Ohrt a affirmé avoir ignoré
que l'ordre de s'arrêter avait été donné par un navire
d'inspection.
6 C'est dans ces conditions que le Kriminal- og Skifteretten i
Frederikshavn a soumis à la Cour les questions préjudicielles
suivantes:
«1) L'article 2 du règlement (CEE) n_ 1382/87 de la Commission,
du 20 mai 1987, établissant des modalités d'application en ce
qui concerne l'inspection de navires de pêche, doit-il être
interprété en ce sens que la flamme d'inspection ou le signe
d'inspection décrit à l'annexe I du règlement doit être arboré
sur l'embarcation d'accostage (canot pneumatique) ou suffit-il
que le bâtiment porteur `Nordjylland' arbore cette flamme ou ce
signe?
Au cas où la réponse serait que l'embarcation d'accostage ne
doit pas arborer la flamme/le signe, d'autres décisions préjudicielles
ne sont pas demandées.
Dans le cas contraire
2) Un éventuel non-respect des dispositions de l'article 2 a-t-il
en droit une incidence sur le fait de savoir si le capitaine d'un
navire a l'obligation, en vertu de l'article 3, de se conformer
aux ordres de l'autorité procédant à l'inspection et, dans
l'affirmative, quelle est cette incidence?»
7 S'agissant de la première question, il convient d'observer que
ni l'article 2 ni les autres dispositions du règlement n'ont
pour objet de définir le type de navire qu'un État membre peut
désigner ou utiliser comme navire d'inspection.
8 En revanche, l'article 2 du règlement vise à déterminer, de
manière uniforme, les conditions d'identification d'un navire
d'inspection. Il convient de rappeler à cet égard que tout
navire prétendant représenter l'autorité compétente d'un État
membre porte un signe ou une flamme. Seul un navire arborant, de
manière visible, ce signe distinctif permet au capitaine d'un
bateau de pêche d'identifier le navire d'inspection et d'obtempérer
à ses ordres, sans autre forme d'avertissement, ainsi que le prévoit
l'article 3, paragraphe 1, du règlement.
9 Cette constatation ne saurait être infirmée par le fait que,
comme en l'espèce, le bateau qui procédait à l'inspection était
accessoire au navire d'inspection principal, mais opérait
provisoirement d'une manière indépendante.
10 Dès lors, il y a lieu de répondre à la première question
que l'article 2 du règlement doit être interprété en ce sens
que tout navire d'inspection doit arborer, quels que soient son
type ou ses dimensions, le signe ou la flamme d'identification décrit
à l'annexe I de ce règlement.
11 Par sa seconde question, le juge de renvoi demande en
substance si le capitaine d'un navire de pêche peut, pour
justifier le non-respect des ordres qui lui sont donnés en
application de l'article 3 du règlement, faire valoir que
l'autorité procédant à l'inspection ne s'est pas fait reconnaître
comme telle par le signe ou la flamme visé à l'article 2 du règlement.
12 Il convient de relever que ce signe et cette flamme
constituent des signaux d'identification. L'absence de ceux-ci
n'enlève pas à un bateau, désigné comme navire d'inspection
par un État membre, cette qualité.
13 Le fait d'arborer, de manière visible, le signe ou la flamme
en question doit donc être considéré comme un moyen suffisant
pour prouver la qualité de l'autorité chargée de l'inspection,
sans être pour autant le moyen unique. Dans le cas où lesdits
signes font défaut sur un navire d'inspection, il est permis de
présumer qu'un capitaine de bateau de pêche à inspecter ignore
que l'ordre de s'arrêter lui est intimé par un représentant de
l'autorité compétente d'un État membre. Cette présomption
sera toutefois écartée s'il est prouvé que le capitaine du
navire à inspecter avait connaissance de la qualité de
l'autorité inspectrice.
14 En conséquence, il convient de répondre à la seconde
question que l'obligation de se conformer aux ordres d'un représentant
de l'autorité compétente d'un État membre, en vertu de
l'article 3 dudit règlement, présuppose la connaissance de la
qualité de ce représentant par le capitaine d'un navire faisant
l'objet d'une inspection. En l'absence du signe ou de la flamme
d'identification, prescrit par l'article 2 du règlement, le
capitaine est présumé ignorer cette qualité, à moins que les
autorités poursuivant l'infraction n'établissent qu'il en avait
connaissance.
Décisions sur les dépens
Sur les dépens
15 Les frais exposés par le gouvernement danois et par la
Commission des Communautés européennes, qui ont soumis des
observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un
remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties
au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la
juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur
les dépens.
Dispositif
Par ces motifs,
LA COUR
(quatrième chambre)
statuant sur les questions à elle soumises par le Kriminal- og
Skifteretten i Frederikshavn, par ordonnance du 6 octobre 1994,
dit pour droit:
1) L'article 2 du règlement (CEE) n_ 1382/87 de la Commission,
du 20 mai 1987, établissant des modalités d'application en ce
qui concerne l'inspection de navires de pêche, doit être
interprété en ce sens que tout
navire d'inspection doit arborer, quels que soient son type ou
ses dimensions, le signe ou la flamme d'identification décrit à
l'annexe I de ce règlement.
2) L'obligation de se conformer aux ordres d'un représentant de
l'autorité compétente d'un État membre, en vertu de l'article
3 dudit règlement, présuppose la connaissance de la qualité de
ce représentant par le capitaine d'un navire faisant l'objet
d'une inspection. En l'absence du
signe ou de la flamme d'identification, prescrit par l'article 2
du règlement, le capitaine est présumé ignorer cette qualité,
à moins que les autorités poursuivant l'infraction n'établissent
qu'il en avait connaissance.